Les « charges patronales », quésako ?

Le mot « charge » est issu du latin « caritare » et désigne à partir du 13ème siècle, ce qui est pesant, ce qui est contraignant et, finalement, une attaque puissante, le plus souvent de cavalerie. D’un point de vue juridique, les « charges patronales » ou « charges sociales » désignent les prélèvements sociaux et fiscaux ayant pour assiette une fraction ou la totalité du salaire. Le salaire est une partie de la force de travail que le patron peut vendre. Ce qu’il paye au titre des « charges » sont des cotisations sociales que l’on peut aussi appeler « salaire différé ». La baisse du « coût du travail » par la remise en cause permanente de ces cotisations fait partie de la stratégie que le patronat met en oeuvre pour accroître ses profits. Alors que la richesse est issue du travail le patronat veut (et parvient) à faire croire que ces cotisations sont le fruit de sa générosité.

En fait, sans le fruit du travail des salariés, le patronat n’aurait rien !

En 1982 le président du patronat français Yvon GATTAZ proclame que « les entreprises sont exsangues » en raison des cotisations sociales. Il obtient du gouvernement un moratoire qui conforte la nouvelle politique de désinflation compétitive. Cela provoque la désindexation des salaires sur les prix. Les luttes, sous ce « gouvernement de gauche » ne seront pas au rendez-vous et, sous l’effet conjugué du blocage des salaires, la perte du pouvoir d’achat, la désindustrialisation de notre économie, entraînant l’augmentation du nombre des chômeurs, les casses de Sécurité Sociale, des ASSEDIC, seront déclarées en déficit. Ce qui jusque la était la caractéristique de la protection sociale française, va être mis à mal. Le premier ministre Michel ROCARD, avec l’appui très officiel de la CFDT et la bénédiction du patronat, va instaurer la Contribution Sociale Généralisée. Cet impôt (la CSG) va frapper tous les citoyens: salariés, retraités, privés d’emplois, préretraités. Il s’appliquera aussi sur les pensions d’invalidité, les contrats d’assurance vie les plans d’épargne logement et allocations sociales diverses. Son taux qui était de 1,1% atteindra rapidement 7,5% pour les salaires ce qui représentera plus de 20% des recettes du régiment général de la sécurité sociale.

En 2009 les allègements des cotisations représentaient 33 milliards d’euros. C’est ainsi que, d’une part, un transfert des charges au détriment des ménages et au bénéfice du patronat s’est opéré, et, d’autre part, le gouvernement aura introduit un lien de dépendance des budgets sociaux à l’égard de l’Etat ainsi qu’une imbrication des budgets dominée par la politique fiscale de l’Etat.

Ainsi, si dans les années 1980 les cotisations sociales représentaient 90% des ressources de la Sécurité Sociale elles ne représentent plus, aujourd’hui en 2016, que 60%. La différence est partie de la poche des salariés dans celle du patronat. Le terme « charge patronale » est un abus de langage qu’il faut combattre. Dans cette lutte idéologique, gageons qu’un jour, avec le prélèvement de l’impôt à la source, un zélé économiste susurrera que c’est le patron qui paye notre impôt sur le revenu !

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